2018 – La Champagne
Perspectives rassurantes en Champagne
Après les fêtes en famille, l’année reprend à pleine vitesse avec une nécessaire escapade en Champagne…qui reste, malgré la météo assez «humide»,
un lieu à la beauté ravissante et troublante.
J’ai une fois de plus été séduit par la qualité de ses produits et impressionné par la si rapide évolution régionale !
J’aimerais vous parler du millésime 2017, une parenthèse assez «sombre», qui a sans doute mis sur la paille la plupart des producteurs, mais qui pourrait aussi représenter un étape importante vers des équilibres nouveaux.
Ce fut une année déplorable, allant du gel printanier à une fin de printemps indien, d’un été froid et pluvieux à un début d’automne égal. De tous les cépages à peau rouge, ce sont ceux qui ont souffert le plus, le Chardonnay, dans des rares cas, a su donner des jus avec des matières discrètes.
Je me sens vraiment touché d’avoir pu goûter les vins clairs de 2017 après fermentation malolactique. Pour les producteurs, c’est comme se mettre à nu face au jugement sur une partie de leur production qui n’est sûrement pas la meilleure de la cave. Ceci ne concerne qu’un millésime dans les dernier 5-6 années et on verra bien comment les vins de réserve vont étoffer et assagir les bases des assemblages 2017. D’un point de vue analytique, l’acidité est au rendez-vous, mais à mon sens ce ne sont pas des acidités mûres et harmonieuses.
Mon attention était attirée par la polarité croissante entre les grosses maisons qui menacent de vouloir revenir à un payement des raisins proportionnel à la qualité du produit et pas seulement de l’échelle des crus, et les petites exploitations récoltant-manipulant. L’écart entre ces deux usages est assez frappant.
Les petites exploitations à conduite familiale voient de plus en plus l’arrivée de la jeune génération à la tête du bateau, avec une nouvelle vision de leur «terroir» et une manière consciente et mature de le valoriser. C’est là ou des parcelles sur des lieu-dit de loin pas les plus favorables (historiquement) donnent des expressions fortement identitaires. Ça va de soi que cette transition stylistique, soit la conséquence d’une transition dans les méthodes culturelles qui se dirige gentiment vers la réduction / élimination de produits de synthèse.
Contrairement à ce qu’on pourrait en déduire, je ne suis pas en train d’élever le petit et de démonter le grand. En visitant les grosses maisons champenoises (>1M de bouteilles par année), je me dois de faire chapeau bas face à la régularité des cuvées de base, et la capacité de «prévoir» et diriger l’évolution du produit à distance d’année, en s’adressant à un client qui ne recherche que d’être réconfortés par un produits qui reste fidèle à soi-même.
A mon avis, les meilleurs exemplaires de cuvées sont le résultat de l’art de l’assemblage, de la maîtrise de l’utilisation des vins de réserve en fonction de la base utilisée (vin de l’année auquel on assemble les autres vins de réserve), de la gestion du dosage, afin de garantir la continuité de style et la marque de la philosophie du domaine.
Si l’on se trouve encore loin de l’application réelle, la question d’une agriculture durable se pose dans les grandes structures depuis des dizaines d’années. La hausse de la qualité demandée par le négoce va sans doute conduire vers un changement du marché champenois. Les exploitations vigneronnes conduites comme activité de fin de semaine seront de moins en moins viables (sauf années exceptionnelles ?) car la ponctualité des traitements et la proximité au vignoble seront de plus en plus nécessaires.
Des centres d’expertise chargés des traitements (voire également des travaux de la vigne en générale) seront constitués, soit par les détenteurs des plus grosses parts du marché, soit par l’interprofession (voire la conjonction des deux). Cela laisse l’espoir que le changement vers une viticulture « durable » puisse gagner rapidement de l’ampleur dans la région dans la restructuration par les grandes entreprises. Ce sera, encore une fois, une raison pour revenir en Champagne et observer l’évolution des courantes de pensée et d’action !
Depuis toujours on reconnait la qualité unique des mousseux qui provoquent très rapidement une sensation d’allégresse due à la plus rapide assimilation de l’alcool par les parois veineuses à cause du CO2. Si en plus il nous est donné de tomber sur un grand champagne, cela peut devenir un plaisir sublime, presque «guérissant» qui, contrairement à ce que l’on pense, reste tout à fait économiquement accessible !
Donc…santé !