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Des vins oranges et de la macération

Souvent on se demande si certains plats se prêtent mieux à être accompagnés par un blanc ou un rouge,
selon sur quel paramètre se fonde la réponse, elle peut être parfois affirmative dans les deux cas menant alors à deux rencontres complètement différentes dans la bouche de l’heureux dégustateur.

 

Un des focus de cet été sera sur les blancs vinifiés tel qu’un rouge, avec donc une plus ou moins longue phase de macération des peaux dans le jus.
Le résultat ainsi obtenu sera un profil chromatique plus chargé virant de l’ambre à l’orange ou au terre de Siena. Si le cépage constitutif de la cuvée est aromatique, les caractères distinctifs seront certainement mis plus en avant. La texture en bouche sera déterminée par l’équilibre astringence-amertumes, souvent enrobée par un bon gras, accentué par le taux faible de collages et filtrages. Voilà la naissance d’un « orange wine » !

 

La phase de vinification/macération peut avoir lieu dans des contenants de différente nature et capacité, cependant, depuis une vingtaine d’années, l’amphore redevient d’actualité. Celle-ci, enterrée jusqu’à la bouche ou simplement stockée en cave en position verticale, se montre encore aujourd’hui une solution viable. La pratique de l’enterrement est très utilisée pour maintenir une température et humidité constante le long de l’année et éviter grâce à cela un excès de perte par transpiration.
Après la macération, qui peut durer quelques jours comme plusieurs mois, le vin est normalement décuvé et élevé en foudre / vasque jusqu’à la mise en bouteille, en fonction de la qualité du raisin à la vendange et du style de produit voulu.

 

La pratique de cette « tradition » peut être retrouvée à maint endroits dans le monde, de la Georgie (Caucase) à la Sicile, en passant bien évidemment par les Alpes.
Je me concentrerai par la suite sur l’arc alpin oriental, entre le Friuli, la Slovenie et l’Autriche.
Le vignoble se distribue autour du socle cristallin sur des sols argilo-calcaires et des sous-sols d’origine sédimentaire, avec des phénomènes de « carsisme » plus ou moins accentués en fonction du lieu spécifique. Ces sols alcalins, plus ou moins argileux et parfois très riches en fer, confèrent aux vins leur colonne vertébrale et contribuent à leur spécificité, même si celle-ci est un peu moins facilement identifiable sur des cépages aromatiques.

 

Du côté autrichien on retrouve surtout Sauvignon blanc et Chardonnay (Morillon), parfois élaborés en mono cépage, d’autre fois comme cuvées parcellaires issues de vieilles vignes où l’assemblage est conçu notamment à travers la complantation de plusieurs variétés.
Les vins issus de cette méthode sont « légèrement » marqués par la macération, puisqu’elle se limite à quelques jours, contrairement aux semaines, voire mois , nécessaire à ses voisins de Collio et Carso.

 

Sur le versant italo-slovène on remarque une présence plus élevée de variétés autochtones, telles que la Malvoisie Istrienne, la Ribolla, la Vitovska. En rouge la scène est dominée par le Terran (Refosco aux pédicelles vertes) et le Merlot, bien que ceci soit normalement vinifiés et vieillis traditionnellement dans de l’acier foudre ou barrique.

 

Si on passe à la phase applicative, l’arrivée de ces vins à table, on retrouve des accords très intéressants sur les viandes blanches, les sauces crémés, les champignons et des substancieux plats végétariens, grâce à cette composante végétale des rafles et de tannins blancs des peaux. A ne pas manquer aussi avec un grand Crudo di San Daniele ou des bruschette au lard.
Sur ce, une toute bonne dégustation… et pourquoi pas une fois ensemble sur place !